- LA VIE DE L’ ESPRIT -
Par définition l’esprit est un lieu où s’entrecroisent et demeurent des données de tous ordres, captées et accumulées au fil du temps ; une fonction de l’esprit, la mémoire, permet cela. Nous constatons que le propre de l’esprit est de fonctionner selon ce qu’il est dans ses attributs et caractéristiques. Il se déclenche et travaille de lui-même sans que nous ayons besoin de le forcer dans la mesure où l’objet de son effort est une source d’intérêt pour lui ; dans le cas contraire il faut lui adjoindre le support d’une volonté accompagnatrice .
Au petit matin, dès la veille reprise, nous le constatons en activité sur des sujets divers et variés, mais plutôt ceux dans lesquels nous nous impliquons par choix conscients. Il nous offre sa puissance d’investigation et de résolution, que nous pouvons utiliser tout à loisir. Cela fut dit maintes fois : l’esprit aime l’activité : il s’y complait, s’en repaît et ne trouve de paix qu’à travailler en continu, de telle sorte que sa devise pourrait être : ne s’use que si l’on s’en sert peu ou pas ! ( ne pas s’en servir du tout semble d’ores et déjà quelque chose d’inenvisageable . )
Il faut le nourrir de son pain quotidien : des problématiques de tous ordres, de la gestion, du calcul, de la planification, de la projection, de l’anticipation, de l’extrapolation, de la mise en rapport, de la déduction, de l’adéquation, de la construction, de l’imagination, de l’intuition, de la divination, de la clairvoyance, de la simplification, de la concision, de la mémorisation, de la reconstitution, de l’ajustement, de l’interprétation, de l’objectivation, de la clarification.......( Vous pouvez en ajouter encore, ...)
Reprenons : L’esprit est amoureux de la construction et de la déduction logique ; il adore suivre des pistes de recherche et arriver à des résultats, mais n’oubliez pas de lui fournir des données correcte dès le départ car, tel l’ordinateur, il exécutera son travail avec les données dont il dispose, sans sourciller !
Exemple : énoncé : « Toutes les créatures de la nature sont gouvernées par l’instinct ». Il déduira que l’homme, en tant que créature de la nature, est gouverné par l’instinct, parce qu’on aura omis de lui préciser au départ que l’homme fait exception : Il est généralement gouverné par la raison. Fort heureusement pour nous, tout le monde exactement a appris un jour que nous sommes différents de toutes les autres créatures, ne serait-ce que, déjà, par le quotient intellectuel. D’où la nécessité d’être toujours très clairs, très pédagogiques dans les explications ou les témoignages que l’on dispense autour de soi. Il est préférable d’être rigoureux, autant que l’on peut l’être, autant que la logique l’exige.
Autre exemple : « Le système économique nommé libéralisme permet à l’homme tous les développements. » Il en déduira que le libéralisme est le meilleur système pour l’homme parce qu’on aura omis de lui dire qu’il faut surtout ne pas oublier d’en juguler par avance les effets pervers. ( Effets pervers : effets de retour inattendus et très désagréables comme, par exemple, la récente crise des « subprimes », à l’origine de la dernière grande déflagration boursière mondiale de l’histoire moderne après celle de 1936. )
L’esprit est donc amoureux de la construction abstraite d’abord, et là on parle de planification, fabrication mentale d’une idée ou d’un plan, pour ensuite faire se concrétiser, par étapes ordonnées, la construction préalablement établie. L’esprit est donc capable d’élaborer dans l’abstrait une démarche visant un résultat, le tout étant nommé « création conceptuelle ». C’est certainement cet aspect de lui-même qui fait notre originalité et notre spécificité au sein du grand nombre de créatures animées de la nature, même si certaines sont aussi capables d’une démarche préméditée, telles que le singe, le rat, le loup, le renard entre autres et principalement connues.
Construire, l’esprit le fait de toutes façons, avec ce qu’il trouve, avec ce qu’on lui donne, parce qu’il ne peut s’empêcher, s’arrêter de le faire. Il en va de sa nature, de son existence et de son essence. A savoir que si un esprit existe, il construit, parce qu’il est formé, a été formé pour cela. Rentrent alors en jeu tous les attributs dont il est doté : la capacité à anticiper,planifier, la capacité à confronter,résoudre, ou encore à synthétiser,établir,progresser. On peut aussi mentionner la capacité à : faire naître (créer), faire grandir (développer) , faire durer ( entretenir) .
L’esprit ne travaille pas : il cherche, il jongle, il structure, il amalgame des données pour parvenir à ses fins. Le corps qui le soutient tombe régulièrement en des états de fatigue mais lui pas, ou bien moins. Existe-t-il une limite à ses investigations ? Elle sera tôt ou tard repoussée ; il n’existe pas de limites aux points d’application sur lesquels peut se porter sa boulimie d’activité ; ne pas conclure pour autant que tout nous est permis car nous avons, par l’esprit encore, à mesurer l’impact de nos activités pour ensuite les doser.
Pour synthétiser/établir/progresser, il faut vouloir s’animer du besoin d’aller de l’avant vers un aboutissement à venir. C’est le désir de jouissance du résultat qui donne l’énergie de franchir les obstacles.
Synthétiser c’est associer des éléments de provenances diverses pour qu’ils s’harmonisent en une réalisation cohérente et durable. Etablir c’est installer un élément de construction d’une manière définitive sur la route qui mène au résultat final. C’est au préalable créer l’élément en fonction du rôle qu’il jouera et, ensuite, une fois installé, s’appuyer sur l’utilité qu’il représente dans la poursuite des choses.
Progresser c’est être habité par le désir de continuer, à partir des concrétisations obtenues, en vue du but à atteindre.
Pour « faire naître ( créer ), faire grandir » il faut être animé du besoin de se consacrer à une œuvre et cela s’appelle plus simplement « se vouer à ».
-Faire naître, ( créer ) , c’est tout d’ abord avoir envie de faire naître, avoir envie de créer « ex abrupto » quelque chose à partir d’une idée, mais parfois sans idée très précise, la création se précisant au fur et à mesure de son élaboration. C’est avoir envie de faire œuvre de créateur parce que l’on s’en sent la capacité, la stature et la maturité.
-Faire grandir, ( développer ), c’est vouloir se responsabiliser de la continuité de ce que l’on a créé. C’est vouloir faire évoluer sa création vers des phases ultérieures jusqu’à un développement final. C’est vouloir créer et promouvoir dans le concret la bonne évolution de sa création, en y mettant tout le soin et l’attention nécessaire : c’est assumer la paternité et la pérennité de l’œuvre embryonnaire ; c’est se vouloir cohérent dans sa démarche en voulant apporter la suite logique à ce qui fut déclenché, production nécessitant un finissage par étapes pour accéder à l’état d’achèvement total.
-Faire durer ( entretenir ) c’est continuer à se vouloir responsable de ce que l’on a provoqué en y restant lié, sachant que l’œuvre, même finie, a besoin d’un ou de plusieurs liens pour assurer son bon équilibre et donc son entretien dans le temps. Entretenir c’est vouloir que sa création perdure et continue à porter fruits d’une manière égale ; c’est donc l’aimer, aimer qu’elle suive la voie pour laquelle elle a été conçue au départ, d’une manière ininterrompue. C’est faire corps avec elle dans un lien indéfectible et inaltérable.
Si nous admettons que l’on peut aller vers tous les problèmes en sachant qu’on y apportera une solution, on se dit qu’on dispose chacun d’un outil extraordinaire, l’esprit, et qui détient la clef de tous les avenirs, petits matins radieux, midis ou soirs sereins et conquérants où toute l’ espérance du monde nous est permise.
Et fort de cette certitude on peut se prendre à rêver que l’humanité toute entière, en tant que race pensante, va vers sa réalisation, à savoir l’élimination du lourd tribut qu’elle paye à l’oubli de ce qu’elle a de plus précieux.
La reconnaissance de l’esprit dans ce qu’il est et dans ce qu’il peut être, c'est-à-dire dans sa totalité active, devrait nous permettre, au plan individuel comme au plan collectif, d’arpenter des chemins de compréhension et de bonheur jamais atteints.
PATRICK JAKUBOWSKI
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