ELEMENTS DE SPIRITUALITE
NOTRE ECRIN ET NOTRE MATRICE
( LA BIODIVERSITE )
Il est effectif que la nature, notre écrin et notre matrice, attend de nous un certain comportement. Tout élément de cette dernière se trouve être contributif de l’ensemble et se manifeste en tant que tel. De la faune à la flore rien n’est là gratuitement et chaque parcelle, de par son développement, témoigne de sa juste place et de son juste rôle.
Il semblerait que toute chose venant à apparaître dans ce contexte se voit gratifiée d’une place à tenir, quelle qu’elle soit, et encouragée à le faire. N’est-ce pas là le principe qui sous-tend la biodiversité en expansion, celle-ci s’auto-créant « multiplication » au fil du temps. A savoir que la richesse d’un milieu en espèces est le signe de son extrême vigueur et santé. Que des espèces apparaissent et d’autres disparaissent dans le libre jeu des interactions conduisant à une sélection naturelle c’est là le signe que le biotope fonctionne car la vie, énergie qui sous-tend toute forme animée n’a de cesse de produire de l’évolution et des métamorphoses.
Tant et si bien que tout milieu qui n’a pas été perturbé par l’intervention d’un ou plusieurs hominiens ( le voisin d’à côté qui vient faire ses emplettes ) se trouve en état d’autonomie parfaite et à même de résister aux attaques d’espèces invasives, intempestives parce qu’inopportunes. ( Il jouit de son propre système de défense, comparable aux défense immunitaires des animaux dont l’homme, animal évolué.)
La biodiversité apparaît donc comme le moyen que la vie se donne, dans un milieu particulier et en général, pour se perpétuer c'est-à-dire se maintenir à son plus haut niveau d’expression et de réalisation. A savoir que dans un biotope donné et en général chaque espèce est un maillon dans le maillage, un élément du puzzle et sans lequel ce puzzle serait moins solide. Il va sans dire que plus on enlève des pièces à l’ensemble et plus l’ensemble s’appauvrit, se délite, tombe en déliquescence jusqu’à l’effondrement final.
La biodiversité est comparable à une cathédrale invisible soutenue par l’ensemble de ses constituants et à laquelle il ne faut rien enlever de peur qu’elle ne s’affaiblisse et s’écroule à plus ou moins brève échéance. ( Exemple : les coraux ). La nature, la vie au sens large, se ramifie en biotopes de par toute la Terre, chacun ayant développé ses caractéristiques au fil du temps de par sa situation géographique et de par la foultitude d’éléments qui se trouve intervenir dans son élaboration.
L’espèce humaine apparemment seule à être dotée d’esprit et de conscience, est constatable partout sur notre planète et cela depuis des millénaires. En son sein, un certain nombre de peuples, peuplades dites primitives et que l’on nomme aujourd’hui « peuples premiers » vécurent et vivent encore pour certains en symbiose avec leur milieu. Nous pouvons retirer de l’observation de leurs us et coutumes qu’ils savent considérer la nature dans laquelle ils vivent comme leur meilleure alliée. Ils n’en retirent que ce dont ils ont besoin, en prenant soin de la laisser intacte, à même de continuer à resplendir et produire les fruits attendus.
La nature a toujours été divinisée par les hommes parce qu’étant, de toute évidence, la mère nourricière, (« alma mater » chez les romains ), la mère originelle ( la « pacha mama » pour les mexicains ), celle de laquelle tout apparut et apparaît encore. Elle est pour certains objet de vénération, objet de culte, une référence fondamentale et première dans l’ordonnancement du monde, un palier entre Dieu et les hommes. Car si Dieu existe, idée la plus largement répandue, tout lui est assujetti par gradations successives, et tout se tient dans sa création, imbrication des mondes observables les uns dans les autres.
La biodiversité est consubstantielle de la nature elle-même, à quelque endroit qu’on la prenne. Et cela pour une raison simple : il y a complémentarité entre les espèces fauniques et floriques d’un même milieu. Ex : en milieu marin il existe des espèces prédatrices dites « au sommet de la chaîne alimentaire » parce que considérant toutes les autres comme des proies possibles pour se sustenter et c’est le requin principalement en ses diverses variétés mais aussi les baleines, les dauphins ....au sommet de la chaîne alimentaire parce que se nourrissant des autres espèces indifféremment et stockant les polluants accumulés dans les proies qu’elles ingèrent, proies qui elles-mêmes ont stocké par ingestion tous les polluants accumulés dans leur nourriture auparavant.
Il y a complémentarité entre les espèces d’un même milieu ce qui confère de l’homogénéité et de la robustesse à ce milieu. On peut constater aussi, dans le cadre de cette diversité, que les espèces s’y multiplient en s’adaptant ce qui donne souvent un « dégradé » d’espèces ayant des traits communs. « La biodiversité est le moyen que la vie se donne pour se perpétuer. »
Qu’ont toujours fait les peuples originels, dits peuples premiers aujourd’hui parce que se distinguant des autres peuples par leur comportement vis-à-vis de la nature ? Nous constatons qu’ils considèrent la nature comme un lieu d’accueil, une entité par elle-même, un sanctuaire à préserver. Nous les y voyons évoluer, y vivre, s’en nourrir sans jamais porter atteinte à sa pérennité. Ils s’y considèrent comme étant un élément parmi les autres, et à ce titre, « hôtes » d’un milieu qui les a précédés et dont ils ne sont en aucune façon créateurs. Ils savent s’y reconnaître à leur juste place et y évoluent harmonieusement en prélevant ce dont ils ont besoin tout en laissant les ressources en présence intactes, à même de leur restituer les services qu’ils en attendent, indéfiniment : sagesse millénaire, intelligence acquise par l’observation et l’expérience, intelligence facile à acquérir pour qui pense à survivre et se projette dans le futur proche et lointain. Il y a aussi l’enseignement des anciens, toujours présents pour orienter dans le bon sens. Exemple : les pygmées, populations nomades de la région du centre de l’Afrique. Ils vivent dans la forêt équatoriale et pratiquent la chasse et la cueillette, échangeant leurs produits avec les communautés d’agriculteurs voisines, dont ils ont adopté la langue. Le fait qu’ils soient nomades contribue à la préservation des milieux qu’ils traversent puisqu’ils en retirent les denrées que pendant la période courte où ils s’y trouvent, laissant derrière eux une « empreinte écologique » passagère et donc non dommageable, les milieux se reconstituant d’eux-mêmes après leur passage.
Qu’avons-nous à retirer de l’observation de ces peuples ?
Le constat aujourd’hui est que nous « surfons » sur une biodiversité qui va déclinant. Elle va déclinant parce que nous ne prenons pas en compte la totalité du biotope dans lequel nous évoluons. Le biotope est considéré et utilisé par rapport aux productions spécifiques et limitées que l’on en attend et tout ce qu’il comporte d’annexe dans ce cadre va être considéré comme soit inutile et donc gênant, soit esthétiquement intéressant et donc à préserver, soit d’une utilité potentielle.
La compréhension que le biotope est un tout en lui-même dont il ne faut rien retrancher est rarement atteinte ou souvent volontairement négligée. L’avidité, l’opportunisme et l’aventurisme de quelques uns mettent souvent en péril ce que la nature a mis des milliers d’années à mettre en place. Les populations autochtones ont souvent à se battre pour faire respecter leurs droits fondamentaux contre des prédateurs puissants, sans foi ni loi, qui ne suivent qu’une visée, s’emparer de territoires qui ne leur appartiennent pas, en expulser les gêneurs et les exploiter à leur guise à des fins de rendement optimal dans ce qui n’est souvent que de la monoculture ; ex : soja transgénique en Argentine et au Brésil.
Tant et si bien que par ces pratiques, d’un milieu luxuriant au départ, on aboutit, à court et moyen terme, à un désert car ces monocultures, à la manière dont elles sont pratiquées, épuisent les sols. Il y a dans ces cas une permissivité coupable des gouvernements en place, un laxisme intéressé car le but est d’accroître le produit national brut ( P N B ) au détriment des petits producteurs, devenus indésirables. Nous pouvons quand même constater que dans nos pays européens les choses ne fonctionnent pas de la même manière, à savoir que le droit de chacun est mieux respecté. Néanmoins nous avons encore de gros progrès à faire pour protéger un certain nombre d’espèces endémiques considérées comme résolument nuisibles par nombre d’agriculteurs.
Il y a donc lieu de renforcer la législation en faveur des espèces qui nous environnent en faisant comprendre que les biotopes et la nature en général sont un bien public et que les particuliers qui s’en trouvent gênés sont priés de s’y adapter et non de les combattre.
PATRICK JAKUBOWSKI