Mystère de la terre noire en Amazonie :
la Terra Preta
L’Eldorado était pourtant là, sous ses pieds. Mais Francisco de Orellana, compagnon de Pizarro n’y a vu que du feu. Lorsqu’il descendit l’Amazone en 1541, ce conquistador à la recherche d’or et de cannelle n’a pas compris que la véritable richesse de ce pays collait à ses bottes en foulant le sol des villages indiens.
La terre noire qui collait à ses pieds (terra preta en portugais), est un sol d’élaboration humaine d’une fertilité exceptionnelle due à des concentrations élevées en charbon de bois ainsi que d’autres matières organiques. Il contient aussi une quantité remarquable de tessons de poterie et l’activité micro-organique y est des plus développées. De plus il possède l’étonnante particularité de se régénérer, c'est-à-dire de s’auto-créer, ce qui en fait une pure merveille agronomique. Ces sols ont été créés par l’homme il y a de 7000 à 500 ans. Sa profondeur peut atteindre 2 mètres.
La terra preta est un sol qui a un taux de carbone très élevé, 13 à 14 % de matière organique. Elle présente des variantes importantes : les jardins attenants aux habitations recevaient plus de nutriments que les champs éloignés. Le charbon de bois était fabriqué à basse température par combustion lente à l’aide de feux étouffés.En raison de sa structure poreuse, le charbon de bois peut emmagasiner une quantité énorme de particules et prévenir le lessivage des matières organiques ainsi que des sels minéraux et des oligo-éléments. Ce phénomène est particulièrement important dans les sols constitués d’argile de peu de surface interne. Le charbon de bois retient l’eau aisément, c’est donc un facteur important dans la conservation de l’humidité des sols.Il possède également la capacité de neutraliser l’acidité des eaux de pluies sur les sols agricoles ce qui en fait une niche idéale pour l’élaboration des bactéries.
Dans tous les sols de terra preta, on trouve des brisures de poteries, constituées de silices argileuses cuites mélangées à divers autres éléments. L’échange dynamique entre la silice et le carbone est le processus fondamental de l’émergence et de la construction de « briques de vie » sur notre planète, semble-t-il. D’autres ingrédients sont potentiellement importants.
Si l’on estime à 1200 ! le nombre des espèces de poissons comestibles dans les rivières de l’Amazonie, il est vraisemblable que les arêtes de poissons et autres déchets de cuisson entrèrent dans la composition de la terra preta et si l’on sait que les shamans utilisaient des os calcinés pour soigner les morsures d’insectes ou de serpents, alors on peut en déduire que les os d’animaux et autres arêtes de poissons étaient utilisés lors du processus de carbonisation dans l’intention de garder la terra preta libre de polluants .
Les microbes et champignons vivent et meurent à l’intérieur de ce substrat poreux, augmentant ainsi la quantité de carbone incluse. Le ver de terre « Pontoscolex corethrurus », présent dans toute l’Amazonie, notamment dans les clairières est capable d’incorporer des particules de charbon au sol minéral et de les broyer finement. Il semble bien que ce ver de terre soit un facteur essentiel de la formation biologique des Terra Preta. Les agriculteurs de cette ancienne civilisation disposaient le charbon de bois en une mince couche régulière favorable à son enfouissement par ce ver de terre.
Cela pourrait expliquer le bas niveau de méthane et autres gaz à effet de serre émis par ces sols. De telles pratiques prévalent encore aujourd’hui chez des paysans de l’Inde fidèles à l’enseignement de leurs textes sacrés.
Sous des conditions tropicales, la dégénérescence des sols est accrue par un facteur 100 en comparaison avec celle des zones tempérées. A l’aide de pratiques écologiques appropriées, la dégradation des sols peut être moins rapide parce que la matière organique est préservée par le complexe minéral-argileux soutenu par une forte activité biologique.
JIBE
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